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Sept ans déjà...
Eh oui, ce magazine est le numéro 84, c'est-à-dire que nous complétons
notre septième année de parution. Enfin, Tahiti-Pacifique magazine a
atteint l'âge de raison.
Sept années d'une aventure passionnante et mouvementée, ça c'est certain,
parfois semée d'embûches, de jalousies et d'autres petites mesquineries,
mais aussi et surtout de rencontres avec des personnes fascinantes et
souvent formidables.
Depuis sa création, Tahiti-Pacifique est surtout devenu un vaste réseau de
"copains", en Polynésie française comme de par le monde, des personnes qui
aiment nos îles et essaient de préserver, tant bien que mal ce dernier
bastion d'un art de vivre plus intelligent. Nous les remercions tous de
tout c¦ur ici. Obstinés dans notre combat de Don Quichote contre le pouvoir
du conformisme planétaire et du pouvoir de l'argent qui marginalisent
l'authentique et l'original, nous devons certainement c'est avec joie que
nous fêtons cet anniversaire car le nombre de nos lecteurs, les seuls juges
qui comptent, augmentent régulièrement et cela fera deux fois en quatre
mois que nous augmentons notre tirage, notre numéro du mois de mars était
épuisé dans pratiquement toutes les librairies de Papeete dès le 25 du
mois.
Que nous soyons toujours présents tient aussi du miracle. En effet, le
marché est microscopique. Ecrire, monter, et publier à Tahiti, un pays de
tradition orale, un journal qui se vendra à 3200 exemplaires demande
exactement le même travail qu'un magazine publié en France qui, lui se
vendra à 500 000 exemplaires ou plus, surtout que pratiquement tous les
coûts, ordinateurs, électricité, photos, papier, etc. sont, taxes et TVA
obligent, dans nos îles au moins le double de ceux de la métropole. Editer
Tahiti-Pacifique est donc un sacerdoce constant et en fin de compte, notre
plus grande fierté est d'avoir réussi à vivre (modestement) de l'écriture
dans un pays où pratiquement personne ne lit ! Encore et surtout faut-il
remercier ici nos nombreux annonceurs, sans lesquels nous aurions disparu
depuis longtemps. Encourageant aussi est le fait que de plus en plus de
jeunes Polynésiens, ceux de la nouvelle génération éduquée, prennent
dorénavant l'habitude de nous lire comme en témoignent courriers et coups
de téléphone.
Mais il faut bien admettre que ces sept dernières années, l'actualité a été
très active et variée en Polynésie française : suspension puis reprise et
enfin arrêt des essais nucléaires, diverses émeutes syndicales et
politiques, un pouvoir politique qui s'est retranché dans une "citadelle",
les grandes mutations de la société en cours, l'immobilisme dans les
inégalités sociales et le maintien des corporatismes, les scandales et
magouilles diverses, l'économie qui devient de plus en plus assistée et
irréaliste, etc., un fouillis d'événements pour bien remplir nos pages. Et
tout cela dans une toute petite communauté isolée où tout le monde se
connaît, où les susceptibilités sont fortes, où la (fausse) rumeur est si
fertile. En réalité, nos petites îles forment une société où "l'effet de
loupe" est puissant et où les comportements, exemplaires comme mégalomanes,
ne peuvent rester cachés longtemps. Une puissante dose d'humour mais
surtout de tolérance, cette grande qualité polynésienne, sont donc
nécessaires au bien-être mental de la vie en milieu îlien.
Car il en faut. On nous contait dernièrement l'incident qui eut lieu lors
de la conférence de presse que donna M. Le Pen à Paris : on en expulsa
"manu militari" l'équipe du "Vrai journal" de Karl Zéro et, en signe de
solidarité, pratiquement tous les autres journalistes quittèrent les lieux.
A Tahiti, les choses sont hélas bien différentes. Lorsqu'on nous expulsa de
la conférence de presse de Président (pourtant, Tahiti-Pacifique n'a
nullement l'insolence de M. Zéro), la plupart des journalistes baissèrent
les yeux et ne mentionnèrent jamais l'incident, mais le "mercenaire" d'une
de ces radios politiques pro-gouvernementales qui prêchent la "bonne
parole" nous marmonna : « C'est tant mieux, on aura plus de place ! » (sic
!). Malgré un sens prononcé de l'humour, cette phrase restera longtemps
"gravée", comme on dit à Tahiti. Ce qui explique pourquoi, face au système
d'un président omnipotent, Tahiti est une des rares contrées de la planète
à ne plus avoir son Club de la Presse.
Pour ce numéro anniversaire, Etienne Teparii vous a préparé un superbe
dossier sur les Maoris de Hawaii et même si vous êtes familiers de ces
îles, il vous passionnera. Il ne faudra pas non plus rater la nouvelle du
mois, le placard doré, hilarant d'authenticité. Ces deux écrits sont
l'oeuvre d'authentiques Polynésiens et nous sommes fiers de les publier.
Bonne lecture à tous et merci encore pour votre fidélité.
Alex. W. du PREL
Directeur de la Publication.
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