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Tuarii Tracqui : du 'ori tahiti à la comédie


Vendredi 14 Juin 2019 - écrit par Laura Théron


En Polynésie, peu nombreux sont ceux qui ne connaissent pas encore Tuarii Tracqui, l’artiste montant des années 2010. Des allures de Bobby Holcomb, un sourire d’enfant, une sincérité évidente, Tuarii apparaît comme un homme accessible et doux, dont la fibre artistique s’exprime avec beaucoup de simplicité. De la danse tahitienne aux planches de théâtre, de Tahiti aux quatre coins du monde, rencontre avec un jeune homme talentueux.



Devant son fare, une vieille maison de ville datant du début du XXe siècle. Crédit photo : Laura Théron
Devant son fare, une vieille maison de ville datant du début du XXe siècle. Crédit photo : Laura Théron
Il est le fils de Manouche Lehartel, grande figure de la danse et de la culture polynésienne et de Michel Tracqui, homme d’affaires du fenua, décédé il y a plusieurs années. Il vit aujourd’hui dans l’une des dernières anciennes maisons de ville de Pape’ete, datant du début du XXe siècle. Comme elle, il semble porter une histoire et une âme venues d’une autre époque.

Né en 1991, le jeune homme a aujourd’hui 27 ans et un curriculum vitae qui fait déjà rêver ! Ses collaborations artistiques sont aussi nombreuses que les facettes de son talent, qui se révèle d’ailleurs à la lumière de nombreux projecteurs… Il fait ses débuts en danse tahitienne en 2007, il n’a alors que 15 ans. C’est sa mère, Manouche Lehartel, qui l’invite à participer aux répétitions de la troupe Toa Reva, qu’elle dirige. Il se souvient qu’à l’époque, la danse ce n’était pas vraiment son "truc" : "C’est l’année où mon père tombe malade, il est au crépuscule de sa vie, c’est clair pour tout le monde… Je pense que Manouche a peur que cela ait un mauvais effet sur moi. C’est l’âge des transgressions, et elle a peur que le décès prématuré de Michel ait un effet néfaste sur moi, à l’école et socialement. Elle ne réfléchit pas, elle me dit d’aller faire le Heiva : ça va m’occuper, ça va me cadrer. Je ne voulais pas faire le Heiva parce que, pour moi, la danse c’était un truc de filles, mais elle me force. Et après ma première répétition, c’est la révélation !"
Une révélation qui démarre comme une activité physique pour canaliser un jeune adolescent dans une année difficile, mais qui va devenir une véritable passion, un moyen d’expression et enfin un métier. Quand on lui demande les souvenirs qu’il garde de ce premier Heiva un peu contraint, on prend la mesure de l’histoire d’amour qui démarre : "C’est mon premier Heiva et c’est le meilleur ! J’en ai fait dix et jamais je n’ai eu un aussi bon Heiva… J’en ai eu de très bons, de manière générale j’ai toujours adoré tous ceux que j’ai fait, mais rien n’est semblable même de loin avec ce que j’ai vécu avec Toa Reva cette année-là."
Lors de cette première année de Heiva, Tuarii découvre l’ambiance intime et familiale qui règne dans les troupes de danse. La maison dans laquelle il vit aujourd’hui était, à l’époque, la costumerie de Toa Reva. Elle était le point de ralliement des danseurs qui passaient leurs week-ends à fabriquer les costumes. Lieu d’échange, de partage et aussi un peu de fête, elle fait naître chez le jeune homme un esprit communautaire qui ne le quittera plus jamais...

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Nucléaire : souriez… vous êtes irradié !

Nucléaire : souriez… vous êtes irradié !
S’il est un sujet qui défraye la chronique en ce début de mois de juin, c’est bien la question explosive des refus d’indemnisations des victimes des essais nucléaires suite à l’amendement dit “Tetuanui”, tant décrié. Si la suppression du “risque négligeable” en 2017 avait été saluée par tous, la réintégration d’un “seuil minimum” ne passe pas… En effet, la modification de la loi Morin réalisée discrètement pendant les fêtes de fin d’année, le 28 décembre dernier, par un amendement inséré au projet de loi de finances 2019 reste en travers de beaucoup de gorges. Concrètement, cette recommandation de la commission “Égalité réelle outre-mer” (Erom), présidée par la sénatrice Lana Tetuanui, qui a été retenue par le gouvernement central puis validée par le Parlement, empêche désormais l’indemnisation des victimes ayant séjourné en Polynésie entre le 2 juillet 1966 et le 31 décembre 1998, dès lors que le Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen) a établi que la dose annuelle de rayonnements ionisants reçue est inférieure à un milliSievert (mSv).
Les conséquences sont tombées comme un couperet le 4 juin, lorsque le tribunal administratif a rendu douze jugements concernant des demandes d’indemnisation rejetées. Face à un contexte très tendu, le président du tribunal s’est même fendu d’un communiqué pour expliquer les décisions prises : deux requérants ont obtenu l’annulation de leurs affaires et un droit à l’indemnisation (la veuve d’un ancien employé du CEP décédé d’un cancer du poumon et un ancien militaire atteint d’un cancer de la vessie), mais les dix autres requêtes ont été balayées par la juridiction en raison du “seuil désormais fixé par la loi”.
Eliane Tevahitua, représentante Tavini Huira’atira à l’assemblée de la Polynésie française, n’a pas tardé à charger Lana Tetuanui en qualifiant l’amendement porté par l’élue du Tapura de “scélérat” . Elle a fustigé aussi le gouvernement : “Le Civen se fonde exclusivement sur le tableau dosimétrique de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), un EPIC (établissement public à caractère industriel et commercial, ndlr) placé sous la tutelle du ministre de la Défense, qui, comme par hasard, ne trouve en Polynésie que des niveaux de radioactivité en deçà de 1 mSv après 1974. Monsieur le président, croyez-vous sincèrement qu’un pays comme le nôtre qui a reçu l’équivalent de 800 fois la bombe d’Hiroshima, puisse présenter des niveaux dosimétriques similaires à ceux d’un pays préservé de toute expérimentation nucléaire tel que la France ?”, posant ainsi une question orale au sein de l’hémicycle. S’en est suivi alors un crêpage de chignons, place Tarahoi, lorsque le porte-parole du président, Jean-Christophe Bouissou, a contre-attaqué sans répondre directement en demandant à la représentante souverainiste si elle ne se sentait pas elle-même “coupable de mensonge par omission en oubliant de dire aux Polynésiens que le député Moetai Brotherson (…) était lui aussi membre de la commission Erom”. Et de conclure : “Arrêtez vos niaiseries nuisibles. (…) Les victimes méritent mieux que vos propos nauséabonds.
Au-delà de ces énièmes enfantillages qui ne servent pas la cause, il y a une phrase qui restera dans les mémoires et qui est déjà tristement culte, celle de la même Lana Tetuanui qui affirme : “Quand on connaît les méfaits du tabac, et les risques de cancer que l’on peut développer, il n’appartenait pas à l’État de venir indemniser tous les fumeurs abusifs et ayant contracté le cancer en Polynésie ou à la suite de leur séjour en Polynésie.” Une comparaison pour le moins fumeuse, car la différence majeure, faut-il le préciser, c’est que l’on choisit de fumer, tout comme l’on choisit de consommer du sucre ou boire de l’alcool… mais pas d’être irradié ! La page du nucléaire au fenua est loin d’être tournée.

Bonne lecture, te aroha ia rahi.
Dominique Schmitt

Dominique Schmitt